Prise en charge des patients présentant un traumatisme sévère de membre(s) en anesthésie

par | Mai 2, 2021 | Anesthésie pratique | 0 commentaires

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-2/5/21 : mise en ligne

Résumé

Recommandations d'orientation et de prise en charge précoce du patient présentant un traumatisme sévère de membre(s)

Recommandations de prise en charge du traumatisme sévère de membre(s)

Orientation du patient présentant un traumatisme sévère de membre(s)

  • Chez les patients victimes de traumatisme sévère de membre(s), il est recommandé d’admettre en centre spécialisé de traumatologie grave les patients ayant au moins un critère de Vittel en préhospitalier (grade 1+).

Réduction pré-hospitalière du saignement du traumatisme sévère de membre(s)

  • En cas d’hémorragie active de membre et d’inefficacité de la compression directe, d’amputation, de corps étranger au sein de la plaie hémorragique, d’absence de pouls radial (critère hémodynamique) ou de multiples actions simultanées à mener, il est probablement recommandé de mettre en place un garrot (grade 2+).
  • En cas de pose d’un garrot, les experts suggèrent de réévaluer, dès que possible, son efficacité, son utilité et sa localisation sur le membre, y compris lors de la phase préhospitalière, afin de limiter sa morbidité (temps de pose le plus court et zone d’ischémie la plus limitée possible) (avis d’experts).

Examen radiologique chez le traumatisme sévère de membre(s)

  • Pour ne pas méconnaître une lésion vasculaire chez un traumatisé grave de membre(s), il est probablement recommandé de réaliser en première intention un angioscanner en cas de présence d’un ou plusieurs des éléments suivants (grade 2+) :
    • notion de saignement extériorisé d’origine artérielle
    • proximité du traumatisme avec un axe vasculaire principal
    • présence d’un hématome non expansif
    • déficit neurologique isolé
    • Indice de pression systolique (IPS) cheville-bras inférieur à 0,9

Délais ostéosynthèse du traumatisme sévère de membre(s)

  • En l’absence d’autre lésion traumatique sévère (cérébrale, thoraco-abdominopelvienne ou médullaire), d’état de choc hémorragique, d’instabilité circulatoire ou respiratoire, il est recommandé de réaliser l’ostéosynthèse définitive et sûre du (des) foyer(s) de fracture des os longs dans les 24 première heures afin de réduire l’incidence de complications locales ou systémique associées, particulièrement pour les fractures diaphysaires fémorales et tibiales à haut-risque de complications respiratoires (syndrome de détresse respiratoire aigüe – ou SDRA -, et embolie graisseuse) (grade 1+).
  • En présence d’une ou plusieurs lésions traumatiques sévères (cérébrale, thoracoabdomino-pelvienne ou médullaire) ou d’un état de choc hémorragique, d’une instabilité circulatoire ou d’une atteinte respiratoire sévère, il est probablement recommandé de retarder l’ostéosynthèse définitive au profit d’une stabilisation temporaire (fixateur externe ou traction selon les délais envisagés) pour réduire la survenue de complications systémiques induites par l’agression chirurgicale, les pertes sanguines péri-opératoires, la coagulopathie, ainsi que le risque d’embolie graisseuse. L’ostéosynthèse définitive et sûre devra être réalisée le plus précocement possible par la suite (grade 2+).

Stratégie chirurgicale de sauvetage du membre traumatisé

  • En cas de stabilité hémodynamique, il est probablement recommandé de procéder à un sauvetage du membre (grade 2+).
  • En cas de choc hémorragique associé à un traumatisme grave de membre(s), il est probablement recommandé d’appliquer une stratégie de damage control. Aucun critère de gravité considéré isolément n’impose le recours à une amputation (grade 2+).

Prévention du risque septique chez le traumatisme sévère de membre(s)

  • Il est probablement recommandé d’administrer une antibioprophylaxie en cas de traumatisme sévère avec fracture ouverte de membres le plus rapidement possible et pour une durée maximale de 48 à 72 heures (à l’exception d’une infection avérée) (grade 2+).
  • Il ne faut probablement pas réaliser de prélèvements microbiologiques systématiques au bloc opératoire lors d’un traumatisme sévère avec fracture ouverte de membres (grade 2-).

Prévention du risque thrombo-embolique chez le traumatisme sévère de membre(s)

  • Chez les patients victimes de traumatisme sévère de membre(s) inférieur(s), il est recommandé d’instaurer une thromboprophylaxie médicamenteuse précoce par héparine de bas poids moléculaire (HBPM), après contrôle de l’hémorragie et de l’hémostase, dont le délai d’instauration sera modulé par le bilan lésionnel (grade 1+).
  • Il n’est pas recommandé de mettre en place un filtre cave chez des patients à risque thrombo-embolique majeur en dehors d’une contre-indication au traitement pharmacologique et mécanique (par compression veineuse intermittente) (grade 1-).

Prise en charge du syndrome des loges

  • Chez le patient traumatisé sévère de membre(s), les experts suggèrent d’effectuer une fasciotomie précoce en cas de syndrome de loge récemment constitué pour réduire l’incidence des répercussions fonctionnelles (avis d’experts).

Rhabdomyolyse aiguë du traumatisme sévère de membre(s)

  • Pour détecter le risque de survenue d’une insuffisance rénale aiguë chez le patient atteint de rhabdomyolyse aiguë post-traumatique après traumatisme de membre(s), il est probablement recommandé de réaliser (grade 2+) : un bilan biologique répété associant un dosage plasmatique de la myoglobine, de la
    • créatine phosphokinase (CPK) et de la kaliémie
    • un sondage urinaire permettant de monitorer la diurèse horaire et le pH urinaire
    • (objectif ≥ 6,5).

Stratégie de réduction de l’incidence des embols graisseux et SDRA du traumatisme sévère de membre(s)

  • Il est probablement recommandé de réaliser un traitement chirurgical d’une fracture de la diaphyse des os longs dans les 24 premières heures post-traumatiques pour limiter les complications respiratoires à type de syndrome de détresse respiratoire aigu ou d’embolie graisseuse (grade 2+).
  • Il est probablement recommandé de réaliser en première intention une ostéosynthèse définitive des fractures diaphysaires d’os long pour prévenir le risque de SDRA et d’embolie graisseuse. Chez les patients hémodynamiquement instables ou présentant une atteinte respiratoire sévère en préopératoire, la balance bénéfice-risque entre une ostéosynthèse définitive ou la pose d’un fixateur externe doit faire l’objet d’une discussion multidisciplinaire (grade 2+).
  • Il est probablement recommandé de ne pas administrer de corticoïdes pour prévenir l’embolie graisseuse en cas de fracture diaphysaire des os longs (grade 2-).

Analgésie du traumatisme sévère de membre(s)

  • Les experts suggèrent qu’en cas de traumatisme sévère de membre(s) l’utilisation d’une stratégie d’analgésie multimodale soit favorisée et que le rapport bénéfice/risque des molécules choisies soit évalué à l’aune de la volémie et de l’atteinte musculaire (avis d’experts).

Fiches pratiques